Saint-Jouin-Bruneval : terminal pétrolier d’Antifer

Saint-Jouin-Bruneval

Si la crise pétrolière a réduit l’utilisation du terminal à 25 % de son potentiel, le port d’Antifer reste l’un des rares outils capables d’accueillir les plus importants navires au monde.

Terminal pétrolier d’Antifer silos — Réservoirs du terminal pétrolier d’Antifer © Philippe Bréard

Un environnement propice

La période de croissance des Trente Glorieuses est fondée sur l’utilisation accrue du pétrole et de ses dérivés. Dans les années 1960, ce contexte économique favorable se heurte à une situation géopolitique à risque : la guerre des Six Jours en 1967 conduit à la fermeture du canal de Suez pendant huit ans. L’allongement du parcours renchérit l’acheminement du pétrole. S’ensuit la construction de supertankers plus rentables et mieux adaptés à ce long trajet. L’État français décide alors de se doter d’un port capable d’accueillir ces navires. Le site d’Antifer est retenu en 1969 pour ses atouts géologiques et sa proximité avec Le Havre, grand port d’importation et de stockage du pétrole.

Une capacité hors-normes

Antifer peut accueillir des navires de 500m de long. Ses 6 réservoirs offrent une capacité de stockage de 640 000 m³.

Terminal pétrolier d’Antifer vue mer — Vue du terminal pétrolier d’Antifer © Philippe Bréard

Un chantier titanesque

Les travaux démarrent en avril 1972. Une route est creusée au cœur de la falaise pour acheminer les matériaux. Une carrière sur site permet d’extraire le calcaire et le silex pour la construction de la digue circulaire de 3,5 km de long pour 39 m de haut. On préfabrique sur site des blocs en béton cubiques rainurés spécifiques, ou blocs « Antifer » désormais couramment utilisés pour la construction de digues. Grâce à un banc de sable au large facilitant l’excavation des fonds marins à 30 m de profondeur, un chenal d’accès de 2 km est creusé. Un oléoduc de 26,5 km rejoint les installations de stockage de la CIM au Havre. Le 25 juin 1976 est inauguré le seul port pétrolier géant à l’entrée de l’Europe du Nord. Le documentaire Le Grand chantier, signé Ariane Doublet et Valery Gaillard, retrace cette épopée.

Le port des géants

Lors de l’inauguration du terminal, le baptême du Batillus, alors plus gros tanker du monde, justifie l’appellation de « journée des géants ».

Un site en reconquête

Les chocs pétroliers de 1973 et 1979 réduisent l’utilisation du port d’Antifer. Il continue néanmoins d’accueillir des navires ne pouvant être reçus ailleurs et permet ainsi au port du Havre d’absorber la croissance du trafic de conteneurs. Malgré le bouleversement environnemental initial, la nature a repris ses droits. Le site classé Natura 2000 présente une flore remarquable et une faune très diversifiée. La plage a été réaménagée en 2011 par l’architecte Bruno Saas puis, en 2019, une cale de mise à l’eau a sécurisé les activités balnéaires. Un belvédère retraçant l’histoire du terminal a été aménagé en surplomb des installations.